Sont appelées heures de délégation ou encore crédit d’heures le temps que l’employeur est tenu d’accorder aux représentants du personnel pour leur permettre d’exercer leurs fonctions pendant le temps de travail sans subir de perte de rémunération. Le nombre d’heures mensuel des membres titulaires du CSE varie en fonction notamment de l’effectif de l’entreprise.
Ce crédit d’heures doit être utilisé pour l’exercice des attributions du comité et bénéficie d’une présomption de bonne utilisation.
1- Quel est le rôle des heures de délégation ?
Un comité social et économique se voit attribuer chaque mois un crédit d’heures de délégation de la part de l’employeur. Ce crédit est fixé par le protocole d’accord préélectoral, par le Code du travail voire par un accord d’entreprise, le règlement intérieur du comité ou une décision unilatérale de l’employeur.
Le crédit d’heures attribué par l’employeur est bien un crédit individuel donné à la discrétion de l’élu titulaire..
Les heures de délégation constituent en pratique des autorisations d’absence au poste de travail. Elles ont vocation à faciliter pour l’élu :
- la rencontre des salariés de l’entreprise ;
- la rencontre de fournisseurs ;
- la tenue de permanences du comité ;
- la préparation des réunions à venir ;
- la consultation de documentations juridiques, etc.
Les heures de délégation étant considérées comme du temps de travail, elles ne valent pas seulement autorisation d’absence, mais doivent aussi toujours faire l’objet d’une rémunération. Le temps consacré aux réunions plénières avec l’employeur est lui aussi considéré comme du temps de travail et donc rémunéré.
Dans le cadre du temps passé en réunion convoquée par l’employeur, réunions ordinaires, réunions exceptionnelles, temps d’inspection ou d’enquête, réunion de fixation de l’ordre du jour, etc., le temps même passé en face-à-face avec l’employeur ou son représentant donne lieu à un maintien de salaire. Et il en est de même pour le temps de trajet passé pour se rendre au lieu de la réunion qui coïncide avec l’horaire habituel du membre du CSE.
2 – Les bénéficiaires du crédit d’heures
Les membres titulaires du CSE, ainsi que les représentants syndicaux au CSE (et au CSE central dans les entreprises d’au moins 501 salariés), bénéficient d’un crédit d’heures de délégation prévu par le Code du travail.
Les suppléants peuvent en bénéficier sous certaines conditions :
- en cas d’accord d’entreprise et de négociation du protocole préélectoral ;
- s’ils remplacent un titulaire ou si ce dernier leur transfère des heures de délégation.
À NOTER
Le secrétaire du comité ne bénéficie d’aucun crédit d’heures particulier pour exercer ses fonctions ; le temps qu’il passe – même pour établir le procès-verbal d’une réunion du comité – doit, sauf accord contraire, s’imputer sur son crédit d’heures de membre du comité.
Représentants syndicaux au CSE et au CSE central
Les représentants syndicaux au CSE dans les entreprises d’au moins 501 salariés bénéficient d’un crédit mensuel d’heures de délégation qui ne peut excéder 20 heures, sauf circonstances exceptionnelles.
Dans les entreprises de moins de 501 salariés, le temps passé en réunion plénière du comité donne toujours lieu à maintien de salaire par l’employeur (mais avec déduction du crédit d’heures de délégation). Par contre, le temps passé en réunion des commissions ne donne pas lieu à maintien de salaire, le représentant syndical devant alors poser des heures de délégation pour ne pas subir de perte salariale.
Dans les entreprises d’au moins de 501 salariés, le temps passé aux réunions du CSE avec l’employeur est rémunéré comme temps de travail et n’est pas déduit des heures de délégation.
Les représentants syndicaux au CSE central bénéficient pour leur part de ce crédit d’heures uniquement dans les entreprises d’au moins 501 salariés, dont aucun des établissements distincts n’atteint ce seuil.
Représentants de proximité
En fonction de leur statut, désignés parmi les membres du CSE ou désignés parmi les salariés de l’entreprise, les représentants de proximité ne bénéficient pas forcément du même crédit d’heures :
- quand ce sont des salariés désignés : l’accord les mettant en place doit prévoir un crédit d’heures spécifique ;
- quand ils sont membres du CSE : un crédit d’heures supplémentaire n’est pas automatiquement prévu, sauf si les partenaires sociaux ont signé un accord en ce sens.
3 – De combien d’heures de délégation disposent les élus CSE ?
Si le nombre d’heures de délégation mensuelles n’est pas fixé dans le protocole d’accord préélectoral, à défaut, le temps mensuel nécessaire à l’exercice des fonctions des élus CSE est fixé à l’article R. 2314-1 du Code du travail. Le nombre attribué à chaque titulaire passe de 10 heures à 34 heures par mois en fonction de l’effectif de l’entreprise (ou de l’établissement pour les élus titulaires d’un comité d’établissement).
Chaque élu titulaire peut cumuler des heures non utilisées sur les mois précédents.
D’autre part, chaque élu titulaire peut donner une partie des heures à sa disposition sur un mois donné, au bénéfice d’un autre élu, titulaire comme suppléant, ou au bénéfice d’un représentant de proximité.
Les heures non utilisées en fin de mois sont reportables dans la limite de 12 mois.
Le temps passé aux réunions plénières ordinaires et extraordinaires du comité social et économique par les membres de la délégation du personnel au CSE est payé comme temps de travail effectif.
Le temps passé aux réunions des commissions est payé comme temps de travail effectif dans la limite d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou, à défaut, par le Code du travail. L’article R. 2315-7 fixe cette durée à 30 heures pour les entreprises de 300 salariés à moins de 1000 salariés et 60 heures pour les entreprises d’au moins 1000 salariés sur les temps passés tant aux réunions plénières qu’aux réunions des commissions. Ce plafond est décompté sur une base annuelle à compter de la date anniversaire de la proclamation des résultats des élections du CSE. Au-delà, les membres du CSE doivent donc utiliser leur crédit d’heures de délégation pour s’assurer un maintien de salaire pour le temps de réunion.
Le Code du travail ne vise pas expressément les seules réunions des commissions dont les missions sont évoquées dans ce même code. Néanmoins, il semble exclure, sauf accord de l’employeur, un maintien de salaire pour le temps passé dans une commission créée spécifiquement par les élus, telle une commission activités sociales et culturelles ou une commission communication.
Le temps passé aux réunions de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) est toujours rémunéré comme temps de travail, sans déduction du crédit d’heures de délégation. Ce temps n’est pas pris en compte pour le calcul du plafond des temps de réunion rémunérés.
Il en est de même pour le temps correspondant à la formation en santé, sécurité et conditions de travail et à la formation économique des membres du CSE, considéré comme du temps de travail effectif.
4 – Quelle stratégie adopter dans la gestion de ces heures de délégation ?
Si le CSE décide de mettre en place une stratégie commune en matière de gestion des heures de délégation, cela va avoir pour conséquence d’organiser les dons d’heures de délégation entre les élus. Cette organisation peut être ponctuelle, pour faire face à un besoin particulier, ou récurrente, prévu par exemple dans le règlement intérieur du CSE.
Supposons que le CSE souhaite mettre en place des réunions préparatoires avant chaque réunion plénière du comité. La présence des élus à ces réunions préparatoires nécessite la prise d’heures de délégation. Donc pas de venue des élus suppléants, sauf à prévoir un partage des heures de délégation des titulaires vers les suppléants pour un nombre d’heures suffisant à la participation à la réunion préparatoire.
Autre exemple, le comité confie d’importantes missions récurrentes aux membres du bureau. Or, appartenir au bureau du CSE ne confère aucune heure de délégation supplémentaire. D’où la possibilité d’organiser un don des heures des titulaires non membres du bureau en faveur des élus membres du bureau, en particulier le secrétaire et le trésorier.
Surtout quand certains élus ne les utilisent pas alors que d’autres épuisent systématiquement le crédit attribué !
Faute d’accord global, il reste possible d’organiser une gestion des heures entre certains élus du comité seulement, à l’initiative ou non du secrétaire.
Lorsque le secrétaire est partie prenante de la décision d’une gestion collective des heures de délégation, il peut s’occuper de veiller à la bonne mise en œuvre du partage. Notamment de veiller à ce que les élus concernés par le partage informent bien l’employeur dans les délais prévus des dons d’heures. Cette mission n’est pas une mission exclusive du secrétaire, d’autres élus pouvant s’en charger.
Le premier rôle du secrétaire du comité est de vérifier que l’employeur attribue bien chaque mois le bon nombre d’heures de délégation.
5 – Le temps passé aux commissions du CSE est-il déduit des heures de délégation ?
Le secrétaire doit aussi surveiller la durée des réunions de certaines commissions mises en place au sein du CSE : commission économique, commission de la formation, commission d’information et d’aide au logement, commission de l’égalité professionnelle. Si la durée des réunions de ces commissions dépasse une certaine durée sur l’année (30 heures si l’entreprise compte entre 300 et moins de 1 000 salariés et 60 heures si l’entreprise compte au moins 1 000 salariés sauf accord), alors toute nouvelle heure de réunion peut être décomptée par l’employeur du crédit d’heures de délégation des élus titulaires. Ce plafond est décompté sur une base annuelle à compter de la date d’anniversaire de la proclamation des résultats des élections du CSE. Il faut donc veiller à ne pas perdre de temps inutile lors des réunions concernées.
6 – Comment s’effectue la prise des heures de délégation ?
Par principe, une heure de délégation doit être posée pendant le temps de travail habituel de l’élu. Si la charge de travail de l’élu n’est pas adaptée suite à son élection ou lorsque les missions le nécessitent (par exemple pour un élu travaillant dans une équipe du matin et dont un rendez-vous a été fixé l’après-midi par l’inspection du travail), l’élu peut également poser des heures de délégation en dehors de son temps de travail. Ces heures de délégation doivent alors être traitées comme des heures supplémentaires ou complémentaires.
Il faut veiller à respecter les durées maximales de travail et les durées minimales de repos, en cumulant heures de travail et heures de délégation.
À NOTER
Les membres du comité qui sont salariés à temps partiel sont soumis à des règles spécifiques : les heures de délégation doivent être prises pour partie sur les horaires habituels, jusqu’à un tiers de la durée figurant au contrat, et pour partie obligatoirement en plus des horaires.
Les salariés au forfait jours doivent, quant à eux, regrouper le crédit d’heures dont ils disposent en demi-journées qui viennent en déduction du nombre annuel de jours travaillés.
7 – Les élus CSE doivent-ils respecter un délai de prévenance avant d’utiliser leurs heures de délégation ?
En pratique, un élu n’a pas à obtenir d’accord préalable de son employeur, du service du personnel ou de son supérieur hiérarchique pour poser à tout moment une heure de délégation. Il est seulement tenu d’informer son entreprise. En revanche, si l’élu est dans l’impossibilité de prévoir, alors il peut prévenir son supérieur au moment même où il part.
Un délai de prévenance indirect doit toutefois être respecté par un élu pour pouvoir utiliser des heures au-delà de son crédit attribué individuellement chaque mois par l’employeur.
D’autre part, un élu titulaire donnant des heures à un autre représentant du personnel doit informer l’employeur au moins huit jours avant que ces heures ne soient utilisées par le bénéficiaire, par écrit, en mentionnant l’identité du donneur et du bénéficiaire et le nombre d’heures transférées.
8 – La comptabilisation et le paiement du temps consacré au mandat par les élus
Pour permettre un suivi ainsi que le paiement des heures, chaque membre du CSE posant des heures de délégation doit indiquer à son retour la durée exacte du temps de délégation.
Cette durée exacte de la délégation doit comprendre les temps de trajet réalisés pour les besoins du mandat pendant l’horaire normal de travail.
Cette comptabilisation qui peut résulter d’un relevé effectué par le manager, d’un décompte réalisé par l’intéressé ou de l’usage de bons de délégation, permettra de distinguer :
– les heures de délégation comprises dans le crédit légal ou conventionnel des heures excédentaires ;
– les heures de délégation prises pendant l’horaire de travail, des heures prises en dehors de l’horaire de travail.
9 – L’employeur doit-il rembourser les frais engagés par les élus ?
C’est à l’employeur de procéder au remboursement des frais de déplacement, d’hébergement et de restauration des élus (réunions du CSE ou formation obligatoire du CSE).
L’employeur est tenu d’assumer les frais de déplacement résultant des réunions périodiques obligatoires et des réunions qu’il décide d’organiser de sa propre initiative, les frais relatifs aux réunions demandées à la majorité des membres du CSE, parce qu’elles sont considérées comme obligatoires, les réunions dans le cadre de l’exercice du droit d’alerte du CSE en cas de danger grave et imminent, les réunions à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves, les réunions à la suite d’un événement grave lié à l’activité de l’entreprise, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l’environnement, les réunions à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel, sur les sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail.
Dans le cadre des réunions non obligatoires ou des réunions qui ne sont pas à l’initiative de l’employeur (réunions préparatoires), les frais engendrés par ces réunions seront donc à rembourser via le budget de fonctionnement de l’instance.
Sauf clause dans le règlement intérieur du CSE ou accord collectif d’entreprise conclu avec l’employeur, les frais de déplacement, les frais de repas ou de logements engrangés lors d’inspections ou enquêtes ne sont pas remboursés par l’employeur et doivent être imputés sur le budget du CSE.
Source : Editions Tissot, INRS, Juritravail